La connasse du supermarché
Avant tout, je tiens à te dire ami lecteur, amie lectrice, que l'anecdote que je vais te raconter est vraie. Cela s'est passé la semaine dernière et me confirme, si j'avais besoin d'en être convaincu, que mes semblables, homo sapiens sapiens, sont vraiment des cons.
Alors voilà, la semaine dernière, j'avais décidé - pour être franc, je n'avais pas d'autre choix, mon frigo étant on ne peut plus vide - j'avais décidé, disais je, d'aller faire quelques courses dans un petit supermarché pas très loin de chez moi, activité qui me plait au plus haut point comme tu t'en doutes certainement. Ayant pour habitude de ne pas trop traîner lorsque je suis de corvée, histoire de ne pas trop faire durer le supplice, je m'active pour ne pas passer plus de 10 minutes (passage à la caisse compris) dans ce petit temple du mercantilisme. C'est que je n'ai pas que ça à foutre moi !
Me voici donc arrivé à la caisse, un sac plein de victuailles dans une main, attendant patiemment mon tour, tel un poulet de batterie qu'on envoie au casse-pipe, celui-ci devant arriver assez vite. C'est alors que je la vois. Elle arrive et se positionne juste derrière moi. Elle n'a pas d'âge (du moins je suis bien incapable de lui en donner un). Elle n'est ni belle, ni laide. Elle est juste quelconque. Je ne me souviens même pas de ce à quoi elle pouvait bien ressembler. Et je m'en fous d'ailleurs. En bref, c'était l'incarnation parfaite de cette ménagère de moins 50 ans, égérie intemporelle des têtes pensantes de TF1 (encore que "têtes pensantes" ne soit peut-être pas le terme adéquat).
Toujours est-il que, mû par je ne sais quel instinct chevaleresque, car si j'y avais tant soit peu réfléchi, je n'aurais certes pas commis cette erreur grossière de débutant, voici que je me retourne, que j'avise ladite ménagère et constate qu'elle n'a dans les mains qu'une baguette. Et, laissant parler mon coeur, n'ayant même pas tenté de réfréner ma générosité légendaire, je m'entends lui lancer : "Allez-y Madame, passez devant moi, vous n'avez qu'un article", geste plein d'altruisme pour un jeune du XXI ème siècle.
Ah... Si j'avais su...
Quelle n'est pas ma surprise face à la réaction de la susnommée. En effet, voici que la vioque me dévisage, je sens ses traits se crisper et distingue l'horreur au fond de ses yeux de bovin. Un mot de plus de ma part et elle appelle la sécurité. En voyant son regard, j'ai cru l'espace d'un instant que ma langue avait fourché, que je lui avais dis quelque chose de salace ou que j'avais sciemment insulté ses ancêtres. Mais que nenni ! Je n'ai pas dérapé et ai même pour une fois laissé parler le côté sympathique de ma personnalité. Crois-moi, je m'en souviendrai. On ne le reverra pas souvent ce côté sympa ! La bonne femme continue à me fixer de son oeil torve. Je soutiens son regard et me fait la réflexion qu'elle ne m'aurait pas regardé autrement si j'avais tenté de la violer dans une ruelle sombre. Encore que, vu sa trogne, elle aurait certainement été beaucoup plus reconnaissante... Mais je m'égare. Pardonne moi ami lecteur pour cette digression de mauvais goût.
Revenons-en donc à nos moutons... Finalement, après quelques secondes qui me semblèrent durer des heures, elle se résout à incliner la tête, me glisse un "merci" aussi chaleureux que si je venais de lui notifier un avis de contrôle fiscal et s'exécute (je ne veux pas dire par là qu'elle s'est immolée par le feu dans un geste de contrition pour obtenir mon pardon, non, non, elle est juste passée devant moi).
"Crève la gueule ouverte, connasse !", me suis-je dit en mon for intérieur. Mais il est des mots tendres qu'il faut savoir garder pour soi... En tout cas, franchement, c'est bien la peine d'essayer d'être agréable. Quel pays de cons, mes enfants, quel pays de cons.
Moralité : je n'ai plus envie de faire les courses (ce qui ne change rien, je n'en avais déjà pas envie avant).
Et mort aux cons !
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